Dent en or

Thomas Pitiot, 2001, in Le Tramway du bonheur

Il avait une dent en or
Et avait libéré Paris,
C’est ce que me racontait mon Père
A propos de lui.
Des yeux noirs, une tête de gitan
Dont les braves gens se méfient,
Il parlait avec le soleil du Midi.
 
Il n’admirait pas plus que de raison le Général,
Pour la France libre
Il embarqua sur un bateau en fer ;
Aurait préféré un vieux grément qui mette les voiles
Pour d’autres rives sans uniformes ni folies guerrières.
 
Tous les dimanches matin il achetait le journal,
Pas étonnant qu’à mon tour
J’ai soif d’humanité.
Lui aussi avait soif
Et c’était bien normal
Que je l’attende quelques instants devant le café.
 
Y’a un âge où l’on pense :
« Bonhomme j’espère que j’aurai le temps de te voir grandir »
Et un âge où l’on se dit,
« Quitte à pleurer j’aurais préféré te voir vieillir. »