P’tite sœur

Thomas Pitiot, 2004, in La Terre à Toto

Un enfant unique c’est bizarre,
Ca parle à son imaginaire
Quand on s’endort seul dans le noir
On se dit qu’on est le grand frère.
 
Bien sûr que j’aurais joué l’grand frère
Intolérant, autoritaire
Mais devant une larme de toi
J’aurais pleuré oh, excuse moi.
 
J’t’aurais grillé en train d’fumer
Un matin dans la salle de bain,
J’s’rais parti en courant cafter
A nos parents car c’est pas bien.
 
Papa aurait été gentil
Alors tu t’s’rais permis’d’fuguer,
J’t’aurais rattrapé à Franprix
Avec ta copine Jean-René.
 
Refrain
P’tite sœur, oh, p’tite sœur…
 
On m’aurait dit « Qu’est-ce qu’elle te r’semble »
J’aurais dit « C’est pas très sympa,
Moi j’ai le regard de maman,
Elle a le nez de notre papa ».
 
Bien sûr que tu m’aurais soûlé
A vouloir nous suivre partout,
Moi et tous mes copains d’troisième
Toi qui n’étais qu’une p’tite sixième.
 
La tendance se s’rait renversée
Autour du baccalauréat
J’t’aurais prié de m’présenter
A ta copine Fatoumata.
 
Refrain
 
T’aurais voulu faire du Théâtre
J’t’aurais dit « Va passer l’bac C ! »
Un comédien dans la famille,
A mon avis c’est bien assez.
 
Mais j’aurais été drôlement fier
Un soir à la maison d’quartier,
Spectacle de l’atelier hip-hop,
T’as vu ma sœur, elle sait bouger !
 
J’t’aurais fait tes dissertations
Avec mon style très personnel,
La prof aurait cerné l’poisson ;
Ton frère, toujours à jouer le rebelle…
 
Refrain
 
Tu s’rais sans doute partie avant
Me laissant avec nos parents,
Deux ans d’études à l’étranger
Moi ça j’aurais jamais osé.
 
Et puis j’aurais été Tonton
Du genre le bel oncle incarné
Mais ça c’est pour une autre chanson,
T’aurais été la tante rêvée.
 
De temps en temps elle disparaît
La gamine des premières années,
La belle jeune fille qui s’enivrait
Tant qu’elle oublia d’exister.
 
De temps en temps elle apparaît,
Me tient la main pour avancer ;
Je lui dis « Merci pour c’que t’es »,
Elle me remercie d’exister.